Stockage véhicule |
Publié par INPI, Octobre 2021
La distribution de marchandises périssables, et donc sensibles à la température ou à l’humidité, nécessite le recours à des véhicules réfrigérés. Pour ce faire, de tels véhicules embarquent des systèmes de réfrigération (groupes froid) qui permettent un contrôle des conditions au sein des remorques. Reposant généralement sur des cycles de compression et détente de fluides réfrigérants, ces systèmes peuvent être alimentés de plusieurs manières selon notamment la taille du véhicule. Dans le cas des véhicules utilitaires et certains porteurs, les groupes froids peuvent être entrainés directement par le biais d’une poulie-moteur connectée au véhicule ou via la batterie de ce dernier. Dans le cas des semi-remorques, les unités de réfrigération sont alimentées par des moteurs à combustion indépendants eux-mêmes connectés à des réservoirs distincts. L’usage de diesel est alors la solution la plus répandue.
Selon l’ADEME, le système de réfrigération représente entre 10 à 30% de la consommation en carburant d’un poids lourd frigorifique (5 à 15% pour un groupe optimisé). L’optimisation des systèmes frigorifiques constitue ainsi un défi important pour le secteur, tant d’un point de vue de l’amélioration de l’efficacité énergétique que de la performance environnementale. Plusieurs alternatives aux systèmes diesel historiquement utilisés ont ainsi été développées : groupes frigorifiques fonctionnant à l’hydrogène, à l’azote liquide, ou encore au GNV.
Le stockage du GNV sous forme liquéfiée permet une plus grande autonomie que sous forme condensée. Cette configuration nécessite toutefois de stocker le carburant à une température très faible, et par conséquent requiert l’emploi de réservoirs isolés thermiquement afin de maintenir le gaz à l’état liquide. Malgré tout, des échanges thermiques avec l’atmosphère environnante subsistent inévitablement, causant l’évaporation d’une partie du GNL. La part évaporée est communément appelée gaz d’évaporation (« BOG » en anglais).
Lorsque la source de carburant GNL n’est pas consommée, en particulier lorsque le moteur est arrêté, la formation de BOG entraîne une hausse de la pression dans le réservoir de carburant. En l’absence d’un mécanisme de libération de la pression, cette accumulation peut être de nature à endommager le réservoir. Afin de pallier à cette problématique, il est d’usage de doter les réservoirs de GNL d’une soupape de sécurité permettant l’évacuation des BOG dans l’atmosphère dès lors que la pression atteint un certain seuil. Si ce dispositif permet d’assurer un maintien de la pression à des niveaux sûrs, il risque toutefois de causer une mise à l’évent de quantités non négligeables de carburant. Au-delà de la perte d’efficacité, ces pertes présentent un impact environnemental important étant donné le fort pouvoir de réchauffement du méthane.
Figurant parmi les leaders mondiaux des solutions de climatisation, la société américaine Carrier Global Corporation est notamment très présente sur le secteur du transport, via sa filiale Carrier Transicold. L’entreprise a ainsi récemment breveté un système permettant d’optimiser l’efficacité énergétique des poids-lourds réfrigérés fonctionnement au GNL, en récupérant le BOG autrement mis à l’évent afin d’alimenter l’unité frigorifique.
L’innovation réside dans l’ajout d’une canalisation permettant de rediriger, dans certaines configurations, les BOG issus du stockage GNL principal (servant à alimenter le moteur du véhicule) vers le système de réfrigération adossé à la remorque. Cette modification permet de réduire la consommation de l’unité de réfrigération, autrement alimentée par un second réservoir indépendant (GNC – 200 à 250 bars). Le système et les différentes briques le constituant sont représentés sur le schéma ci-dessous.
Le réservoir GNL principal est classiquement équipé d’une vanne permettant l’évacuation des BOG dès lors que la pression atteint une valeur seuil prédéfinie (15 à 20 bars). Dans ce cas, la vanne présente toutefois pour particularité de pouvoir contraindre la direction prise par les gaz d’évaporation, soit vers le système de mise à l’évent, soit vers la canalisation alimentant l’unité de réfrigération. Pour des raisons évidentes de sécurité, la vanne est positionnée par défaut sur la première configuration.
Le groupe froid est régi par un système de contrôle, permettant de gérer l’apport en carburant depuis le réservoir de GNC en fonction des conditions souhaitées au sein de la remorque. En complément, le système permet également le contrôle à distance de la vanne. Lorsque le groupe froid est en fonctionnement, la vanne est positionnée de sorte à récupérer les BOG. Les groupes froid fonctionnent indépendamment du moteur du véhicule principal et sont généralement en marche dès lors de la remorque est chargée avec des marchandises sensibles. Lorsque le groupe froid est éteint, la vanne retrouve en revanche son état initial et les BOG sont redirigés vers l’atmosphère pour éviter toute surpression préjudiciable.
Le système proposé permet d’envisager des économies de carburant et une réduction de l’empreinte environnementale globale du véhicule, dans des proportions qui ne sont toutefois pas détaillées dans le document. Selon les déposants, cette nouveauté permet également de diminuer les risques d’accident, en réduisant la quantité de gaz inflammable relâchée à l’atmosphère au niveau des véhicules.
Le dépôt de ce brevet par l’une des entreprises leader du marché illustre l’importance prise par le sujet, qui fait également l’objet de développements par d’autres acteurs. En particulier, la société Esametal a ainsi mis au point un système permettant de valoriser le froid dégagé par le GNL lors de sa regazéification pour refroidir une remorque réfrigérée par échange thermique (cf. veille T1 2021). En permettant d’envisager des améliorations sensibles des performances, ces systèmes permettent de renforcer la pertinence des poids lourds GNL pour le transport réfrigéré.